Ce jeudi 20 février, dans le cadre de leur niche parlementaire, les député·es du groupe Gauche Écologiste Sociale de l’Assemblée nationale devaient défendre une proposition de loi pour expérimenter la Sécurité Sociale de l’Alimentation (SSA). Un texte porteur d’une ambition forte : garantir à toutes et tous un accès digne à une alimentation de qualité, tout en soutenant un modèle agricole durable, rémunérateur pour les paysans et respectueux des écosystèmes.
Mais mettre en place et faire fonctionner une Sécurité Sociale de l’Alimentation ne peut se faire sans un véritable outil démocratique. L’alimentation est profondément liée aux cultures, aux choix et aux modes de vie de chacun·e : il s’agit donc de respecter la diversité des pratiques alimentaires, en garantissant à toutes et tous le droit de choisir ce qu’ils et elles consomment. En même temps, face aux enjeux agricoles, sociaux et écologiques, ce projet ne peut être qu’un effort collectif : décider ensemble, construire une gouvernance démocratique, c’est s’assurer que l’alimentation ne soit plus une marchandise soumise aux seuls intérêts économiques, mais bien un bien commun dont nous devons collectivement assurer l’avenir.
Crise agricole, crise sociale, crise écologique : une urgence absolue
L’actualité brûlante de la révolte agricole a rappelé l’impasse dans laquelle se trouve notre modèle alimentaire. D’un côté, des paysans étranglés par les prix bas et des pratiques commerciales injustes, pris au piège d’un productivisme destructeur. De l’autre, des millions de personnes précarisées, contraintes de se nourrir avec des produits ultra-transformés, mauvais pour la santé, voire de sauter des repas faute de moyens. Aujourd’hui, en France, près de 10 millions de personnes ont recours à l’aide alimentaire.
« Mangez bien pour RIEN ! » 1
À cette double crise, sociale et agricole, s’ajoute une crise écologique majeure. La disparition des terres agricoles sous l’effet de l’artificialisation, la raréfaction de la ressource en eau, l’effondrement de la biodiversité mettent en péril l’avenir même de notre souveraineté alimentaire.
Face à ces constats, il est urgent de repenser l’ensemble du système de l’alimentation en le mettant au service du bien commun et non des profits de l’agro-industrie et de la grande distribution.
Une Sécurité Sociale de l’Alimentation pour garantir le droit à une alimentation saine
Inspirée du modèle historique de la Sécurité Sociale, la SSA repose sur un principe simple : garantir à toutes et tous un accès à une alimentation choisie, de qualité et produite dans des conditions durables.
La proposition de loi portée par le groupe Gauche Écologiste Sociale propose une expérimentation sur cinq ans dans 20 territoires, avec la mise en place de caisses locales de l’alimentation. Ces structures, financées par des cotisations, distribueraient une « allocation alimentaire » à chaque individu, permettant d’acheter des produits auprès de paysan·nes et commerçant·es engagés dans une démarche respectueuse des écosystèmes et du bien-être animal.
Ce projet vise plusieurs objectifs :
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Justice sociale : garantir un droit universel à une alimentation saine, en rompant avec la logique humiliante de l’aide alimentaire.
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Soutien au monde paysan : assurer une rémunération digne aux agriculteurs et favoriser les circuits courts.
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Transition écologique : encourager une agriculture paysanne, bio ou en agroécologie, préservant les ressources naturelles et la biodiversité.
Fin du monde, fin du mois : une fausse opposition
L’alimentation est au cœur du lien entre justice sociale et urgence écologique. Aujourd’hui, les produits sains et de qualité restent souvent inaccessibles aux plus précaires, tandis que la malbouffe est subventionnée par un système agro-industriel destructeur. La SSA permet de dépasser l’opposition entre "fin du monde" et "fin du mois" en posant un droit fondamental à bien se nourrir et en accompagnant la transition vers une agriculture soutenable.
Elle propose ainsi une alternative concrète à la crise de l’alimentation actuelle, en sortant des logiques de marché qui précarisent les paysans tout en fragilisant la santé des consommateurs.
Un projet de société à construire ensemble
La proposition de loi débattue ce 20 février s’inscrit dans une dynamique plus large, portée par des collectifs citoyens, des syndicats agricoles et des chercheurs engagés. Elle s’appuie sur des expérimentations locales déjà en cours, qui démontrent la faisabilité et l’intérêt de ce modèle.
Mais face aux lobbys agro-industriels et aux forces politiques défendant l’ordre établi, l’enjeu est aussi d’imposer un débat démocratique autour de l’alimentation. Qui décide de ce que nous mangeons ? Comment garantir que ce droit fondamental ne soit pas laissé aux seules lois du marché ?
La Sécurité Sociale de l’Alimentation est une proposition révolutionnaire dans le sens où elle redonne aux citoyen·nes le pouvoir sur leur alimentation, tout en construisant un modèle agricole juste et durable. La bataille ne fait que commencer : à nous de nous en saisir pour faire grandir ce projet et obtenir son adoption.
C’est un moyen concret de diriger les cotations en faveur des paysannes et paysans, là où les règles budgétaires empêchent habituellement d’affecter clairement les recettes fiscales. C’est rétablir justice et cohérence dans un système où, trop souvent, la démocratie peine à imposer l’équité !
Signer la pétition pour que la Sécurité Sociale de l'Alimentation devienne une réalité dans notre pays !
https://www.l-apres.fr/pour-instaurer-la-ssa
1 Jean-Pascal Zadi « En place », saison 1, janvier 2023.